Ils s’appellent tous Hérode, ils sont tous plus ou moins consanguins, c’est bien pire que la famille d’Angleterre. Hérode le Grand (-40/-4) a 10 enfants et a réussi à créer un grand royaume avec la bénédiction des Romains qui veillent au grain mais le laissent faire, pourvu qu’il rapporte la paix et les impôts. Bien entendu un certain nombre de ses enfants meurent naturellement ou à la guerre, mais quand vient la fin de sa vie, il y en a encore 2 de trop que Le Grand va faire mourir , Alexandre et Aristobule 4. Ensuite il va donner la Judée et la Samarie à Archelaüs, la Décapole à Philippe et la Galilée à Antipas. Et puis Philippe va aussi récupérer Hérodiade, la fille de Aristobule 4 malheureusement décédé trop tôt ; ils auront une fille dénommée Salomé.
Entre temps, Antipas pique Hérodiade à son frère Philippe, de son vivant (dit-on), ce qui fait scandale. Et Jean le Baptiste n’hésite pas à lui dire que les mariages consanguins sont interdits par la Loi. C’est pourquoi Antipas le colle en prison. Salomé dance et Hérodiade obtient la tête de Jean-Baptiste…Comme dans les bons films américains, la morale est sauve : Antipas va tout perdre et sera envoyé en exil avec Hérodiade en Gaule par Caligula, à St. Bertrand de Comminges dans les Pyrénées. On dit qu’ils étaient accompagnés de leur fille Salomé ? Pas très sûr, car elle a épousé un autre Philippe (le tétrarque) à 11 ans, puis un Aristobule de Chilcas dont elle eut 3 enfants (Hérode, Agrippa et Aristobule). Pas facile de s’y retrouver ! En tout cas l’histoire du lac gelé qui coupe la tête de Salomé, c’est bien dans les Pyrénées !
Mais pourquoi Matthieu, comme Marc et Luc nous parlent de tout cela ? Qu’est-ce que vient faire Hérode au milieu des miracles ?
C’est Marc qui le premier va l’inclure comme cela, au milieu de « nowhere », juste avant la multiplication des pains, peut-être pour mettre en valeur la différence des cultures, la cour des rois et la foule dehors qui a faim ?
- N’oublions pas que dans l’histoire du peuple juif, la religion et le gouvernement sont intimement liés, et qu’il est difficile même pour un rédacteur d’évangile d’oublier de parler du pouvoir
- Il est important de commencer à donner une description du pouvoir d’Hérode comme un méchant et de l’assimiler au pouvoir romain, l’autre méchant. Le dualisme est important dans la culture grecque en 80, il faut du mal pour faire reluire le bien
- Cela permet de réintégrer Jean dans l’histoire, car tous les évangélistes, pas que Luc, tiennent à coupler les deux personnages. N’oublions pas qu’en 85 il y a toujours des communautés baptistes et qu’il convient de ne pas trop les mettre de côté. Certes Jésus a remplacé Jean, mais aucun des évangélistes ne cherche à montrer une rupture trop grande. Dans l’adversité, il vaut mieux s’épauler.
- Et puis finalement, il est bon pour l’histoire de montrer que même le roi (qui n’est pas roi) se pose des questions, est lui-aussi habité par le doute si ce n’est par le remords. Jésus serait-il Jean ressuscité et ainsi doté de pouvoirs extraordinaires ?
Bref tout le monde, du peuple au roi (qui n’est pas roi), se pose la même question : Qui est Jésus ?
Oui c’est vrai, nous aussi.