Si en Galilée Jésus a toujours su se montrer en spécialiste des écritures balayant tous les autres commentateurs des textes, à Jérusalem c’est une autre paire de manches : il y a là tous les grands spécialistes reconnus, on joue dans une autre catégorie. Les Sadducéens, qui ne croient pas en la résurrection, ont essayé de coincer Jésus sur cette question, mais il s’en est bien sorti. Aujourd’hui ce sont les Pharisiens que Matthieu aime tant qui vont s’y essayer. Et là, chapeau Mr. Jésus !
La question est classique chez les juifs : comment donner un ordre aux 613 commandements des textes bibliques, lequel est le plus grand, lequel est le dernier, comment hiérarchiser tout cela pour pouvoir adapter simplement sa vie. Et les scribes ont plein d’idées sur le sujet, que ce soit par un classement chronologique, par l’importance de différents livres, le poids relatifs des auteurs…
Et c’est là que l’on découvre l’homme Jésus en rabbin génial : il va extraire de l’immense liste le verset 5 du Deutéronome 6, que l’on peut considérer comme un commandement clef car il fait partie de la prière du « Shema Israël » (écoute ton Dieu), et il va y accoler le verset 18 du livre du Lévitique au chapitre 19, qui lui est beaucoup moins connu du bon peuple. Il va mettre ces deux commandements au même niveau d’importance, et il va démontrer que cette loi de l’amour double, pour Dieu ET pour son prochain, est à la base de tous les autres commandements. L’analyse est implacable, indiscutable et redoutable car elle simplifie et explique en même temps, elle rend la bible accessible à tout un chacun.
De ces deux commandements certains tireront le sens de la croix, avec un axe vertical qui montre l’amour de Dieu et un autre horizontal qui montre l’amour des autres. Saint Augustin dira « Aime, et fais ce que tu veux », ce qui peut être envisagé comme un raccourci un peu simpliste de tous les textes bibliques. Ce qui me paraît certain, est qu’avant même l’épisode de la résurrection, Jésus montre déjà la puissance de sa connaissance des textes et de son interprétation. On comprend bien qu’il vient donner un coup de pied dans la fourmilière des spécialistes, des prêtres et des scribes. Avec lui, tout le monde comprend.
Quant à l’église d’aujourd’hui, n’aurait-elle pas besoin de repasser ses habitudes, son dogme et ses méthodes à la moulinette de l’amour ?