Ce passage que nous fait lire le programme officiel est une exclusivité de Luc. Il est d’une simplicité biblique si j’ose dire : la vanité religieuse n’est pas de mise avec Dieu. Pas besoin d’être grand théologien pour comprendre ce que Luc veut nous dire.
C’est aller un peu vite en besogne ; le texte est tellement caricatural qu’il doit y avoir autre chose qu’une simple attaque ciblée contre les pharisiens. Cette histoire de collecteur d’impôt qui se tient au Temple à côté du pharisien devrait nous rendre un peu perplexe.
Il convient tout d’abord de réfléchir à la prière juive. Les deux personnages montent au Temple pour prier car les fidèles pouvaient se retrouver sur les esplanades du Temple pour prier individuellement, mais la religion juive dit qu’il faut être au moins 10 pour que Dieu entende. Chacun peut donc prier de son côté en espérant être entendu car le quorum de personnes regroupées pour la prière est atteint.
Nous avons déjà évoqué la question des manières de prier que les rabbins avaient dûment répertoriées. Le pharisien prie donc debout, mais on ne sait pas s’il se balance, ni même s’il lève les yeux au ciel ou non. Le collecteur en revanche prie à la manière des femmes, la tête baissée en se frappant la poitrine en signe de contrition ; il est donc probable que ces hommes soient au Temple pour un sacrifice d’expiation (il y en avait deux par jour).
Le pharisien précise un peu sa vie religieuse : il s’acquitte de la dime et jeûne deux fois par semaine (on se souvient que les juifs pouvaient jeûner individuellement les lundis et les jeudis). Très clairement il s’agit d’un pharisien pieux qui s’applique à respecter la Loi, et même, à en faire un peu plus. Le texte ne donne aucune indication sur la pratique du collecteur. Mais on comprend bien qu’ils ne prient exactement au même endroit, ni de la même façon, le contenu de leurs prières n’est pas le même, on en arrive à se demander s’ils prient le même Dieu.
Ce qui est important dans ce texte est au dernier verset : l’un redescend justifié, l’autre pas. Le Juste, en termes juifs de l’époque, est celui qui observe strictement la Loi. Celui qui est pécheur est celui qui n’observe pas strictement la Loi, ou celui qui s’est éloigné de Dieu : il faut qu’il se purifie de son péché pour se rapprocher de Dieu, c’est à cela que servent les sacrifices de contrition, auquel il pourra peut-être être justifié, ou pardonné par Dieu et dans ce cas, il pourra s’en approcher de nouveau. C’est bien la logique de la religion juive, que Jésus d’ailleurs ne remet pas en cause. On se souvient avoir vu que le renouveau qu’apporte la foi chrétienne est qu’alors que le juif traditionnel reste dans le doute de savoir si Dieu l’a pardonné ou non, une information qu’il ne va recevoir qu’au moment du jugement dernier, Jésus proclame lui que le pardon de Dieu est immédiat et certain, pour peu que l’homme reconnaisse son péché et s’engage à changer, à se convertir.
Le pharisien monte au Temple absolument persuadé d’être Juste et sans péché : il s’auto-justifie dans sa prière à Dieu, « vous pouvez être fier de moi ». Le collecteur est lui tout-à-fait conscient de son péché et il monte au Temple pour demander pardon à Dieu, ce qu’il fera d’une manière certes un peu démonstrative mais ô combien sincère et passionnée : il en faut du courage sur cette esplanade pour se frapper la poitrine comme le ferait une femme ! Et ce que nous dit Jésus, c’est que le pharisien redescend du Temple comme il y était monté alors que le collecteur, lui, a été certainement et immédiatement pardonné.
Tout est affaire de conscience : le juste n’a rien demandé, il n’a donc rien obtenu. Le pécheur a fait son chemin de contrition, il est venu avec son cœur, il a demandé un pardon que le Seigneur lui a donné immédiatement : il est donc bien redescendu différent, il s’est passé quelque chose pour lui dans ce Temple.
Il est vrai qu’à l’époque dans le milieu juif, une pratique religieuse fervente et remarquée pouvait donner accès à une position sociale élevée, alors qu’en même temps, certaines professions considérées peu recommandables condamnaient certains à l’opprobre populaire. L’éthique et le Salut sont deux notions assez différentes en fait : il ne nous est rien dit sur la profession de notre pharisien, est-il un homme honnête ? Il n’est rien dit non plus sur la manière qu’a ce pécheur de collecter des impôts, est-il aussi pourri que les autres ? Les réformateurs insisteront bien volontiers sur le fait que les bonnes œuvres du pharisien n’ont lui ont pas apporté le salut, alors que le collecteur, en revanche, qui a cru en la parole…
Ce que nous dit Luc est que l’on peut prier à l’écart (ce que fait Jésus dans la montagne et ce qu’a fait notre collecteur), qu’on peut prier avec ferveur (le collecteur se frappait la poitrine) en s’adressant au Père (ce que n’a pas fait le pharisien qui priait en lui-même), que si l’on implore avec le cœur, Dieu nous pardonnera tout de suite.
C’est en fonction de l’intention de notre prière qu’il se passe quelque chose, ou non.
Il dit encore la parabole que voici à certains qui étaient convaincus d’être justes et qui méprisaient tous les autres :
Deux hommes montèrent au temple pour prier ; l’un était Pharisien et l’autre collecteur d’impôts.
Le Pharisien, debout, priait ainsi en lui-même : “O Dieu, je te rends grâce de ce que je ne suis pas comme les autres hommes, qui sont voleurs, malfaisants, adultères, ou encore comme ce collecteur d’impôts. Je jeûne deux fois par semaine, je paie la dîme de tout ce que je me procure.”
Le collecteur d’impôts, se tenant à distance, ne voulait même pas lever les yeux au ciel, mais il se frappait la poitrine en disant : “O Dieu, prends pitié du pécheur que je suis.”
Je vous le déclare : celui-ci redescendit chez lui justifié, et non l’autre, car tout homme qui s’élève sera abaissé, mais celui qui s’abaisse sera élevé. »
Commentaire
Ce passage que nous fait lire le programme officiel est une exclusivité de Luc. Il est d’une simplicité biblique si j’ose dire : la vanité religieuse n’est pas de mise avec Dieu. Pas besoin d’être grand théologien pour comprendre ce que Luc veut nous dire.
C’est aller un peu vite en besogne ; le texte est tellement caricatural qu’il doit y avoir autre chose qu’une simple attaque ciblée contre les pharisiens. Cette histoire de collecteur d’impôt qui se tient au Temple à côté du pharisien devrait nous rendre un peu perplexe.
Il convient tout d’abord de réfléchir à la prière juive. Les deux personnages montent au Temple pour prier car les fidèles pouvaient se retrouver sur les esplanades du Temple pour prier individuellement, mais la religion juive dit qu’il faut être au moins 10 pour que Dieu entende. Chacun peut donc prier de son côté en espérant être entendu car le quorum de personnes regroupées pour la prière est atteint.
Nous avons déjà évoqué la question des manières de prier que les rabbins avaient dûment répertoriées. Le pharisien prie donc debout, mais on ne sait pas s’il se balance, ni même s’il lève les yeux au ciel ou non. Le collecteur en revanche prie à la manière des femmes, la tête baissée en se frappant la poitrine en signe de contrition ; il est donc probable que ces hommes soient au Temple pour un sacrifice d’expiation (il y en avait deux par jour).
Le pharisien précise un peu sa vie religieuse : il s’acquitte de la dime et jeûne deux fois par semaine (on se souvient que les juifs pouvaient jeûner individuellement les lundis et les jeudis). Très clairement il s’agit d’un pharisien pieux qui s’applique à respecter la Loi, et même, à en faire un peu plus. Le texte ne donne aucune indication sur la pratique du collecteur. Mais on comprend bien qu’ils ne prient exactement au même endroit, ni de la même façon, le contenu de leurs prières n’est pas le même, on en arrive à se demander s’ils prient le même Dieu.
Ce qui est important dans ce texte est au dernier verset : l’un redescend justifié, l’autre pas. Le Juste, en termes juifs de l’époque, est celui qui observe strictement la Loi. Celui qui est pécheur est celui qui n’observe pas strictement la Loi, ou celui qui s’est éloigné de Dieu : il faut qu’il se purifie de son péché pour se rapprocher de Dieu, c’est à cela que servent les sacrifices de contrition, auquel il pourra peut-être être justifié, ou pardonné par Dieu et dans ce cas, il pourra s’en approcher de nouveau. C’est bien la logique de la religion juive, que Jésus d’ailleurs ne remet pas en cause. On se souvient avoir vu que le renouveau qu’apporte la foi chrétienne est qu’alors que le juif traditionnel reste dans le doute de savoir si Dieu l’a pardonné ou non, une information qu’il ne va recevoir qu’au moment du jugement dernier, Jésus proclame lui que le pardon de Dieu est immédiat et certain, pour peu que l’homme reconnaisse son péché et s’engage à changer, à se convertir.
Le pharisien monte au Temple absolument persuadé d’être Juste et sans péché : il s’auto-justifie dans sa prière à Dieu, « vous pouvez être fier de moi ». Le collecteur est lui tout-à-fait conscient de son péché et il monte au Temple pour demander pardon à Dieu, ce qu’il fera d’une manière certes un peu démonstrative mais ô combien sincère et passionnée : il en faut du courage sur cette esplanade pour se frapper la poitrine comme le ferait une femme ! Et ce que nous dit Jésus, c’est que le pharisien redescend du Temple comme il y était monté alors que le collecteur, lui, a été certainement et immédiatement pardonné.
Tout est affaire de conscience : le juste n’a rien demandé, il n’a donc rien obtenu. Le pécheur a fait son chemin de contrition, il est venu avec son cœur, il a demandé un pardon que le Seigneur lui a donné immédiatement : il est donc bien redescendu différent, il s’est passé quelque chose pour lui dans ce Temple.
Il est vrai qu’à l’époque dans le milieu juif, une pratique religieuse fervente et remarquée pouvait donner accès à une position sociale élevée, alors qu’en même temps, certaines professions considérées peu recommandables condamnaient certains à l’opprobre populaire. L’éthique et le Salut sont deux notions assez différentes en fait : il ne nous est rien dit sur la profession de notre pharisien, est-il un homme honnête ? Il n’est rien dit non plus sur la manière qu’a ce pécheur de collecter des impôts, est-il aussi pourri que les autres ? Les réformateurs insisteront bien volontiers sur le fait que les bonnes œuvres du pharisien n’ont lui ont pas apporté le salut, alors que le collecteur, en revanche, qui a cru en la parole…
Ce que nous dit Luc est que l’on peut prier à l’écart (ce que fait Jésus dans la montagne et ce qu’a fait notre collecteur), qu’on peut prier avec ferveur (le collecteur se frappait la poitrine) en s’adressant au Père (ce que n’a pas fait le pharisien qui priait en lui-même), que si l’on implore avec le cœur, Dieu nous pardonnera tout de suite.
C’est en fonction de l’intention de notre prière qu’il se passe quelque chose, ou non.
Calendrier
Évangiles
Catégories
Intro
Avant-Propos
La foi c'est quoi?