Comme le 8 décembre était un dimanche, on passe à fêter L’immaculée Conception de la Bienheureuse Vierge Marie le lundi, en lisant le texte de l’Annonciation, normalement fêtée le 25 mars, 9 mois avant Noël, ce qui n’est pas sans logique.
Pour mémoire il y a 4 dogmes concernant Marie : l’immaculée conception (Marie serait née sans péché originelle afin que le fils de Dieu ne soit pas contaminé in vivo pendant sa grossesse, dogme émis en 1854), la maternité divine de Marie (Marie mère de Dieu en 431), la virginité perpétuelle de Marie (elle serait restée vierge toute sa vie, en 649) et finalement l’Assomption de Marie (en 1950).
L’annonciation de l’ange Gabriel à Marie est une création littéraire de Luc, qui ne sera pas reprise par Matthieu chez qui l’ange s’est adressé à Joseph en songe, ce qui correspond plus à une vue traditionnelle juive dans laquelle les choses sérieuses sont discutées entre les hommes. J’insiste encore une fois sur le fait que les évangiles de l’enfance de Jésus développés par Luc et par Matthieu sont des romans basés sur des traditions populaires en cours au moment où ils écrivent.
La christologie des toutes premières communautés chrétiennes est que la nature divine du Christ est apparue au grand jour avec la résurrection ; c’est au cours du temps que les chrétiens ont commencé à envisager une nature divine de Jésus plus tôt, certains voyant ce passage de l’humain vers le divin au moment de la Passion, d’autres au moment de la Transfiguration, d’autres encore au moment du baptême de Jésus, et ce n’est qu’assez tardivement (dans les années de Marc et de Matthieu) qu’ils vont envisager une nature divine dès l’enfantement de Marie. Luc va écrire dans un milieu juif d’influence grecque, dans une culture très riche au niveau religion et légendes : c’est la légende d’Isis et d’Hélios, c’est la naissance d’Alexandre le Grand racontée par Plutarque, c’est l’importance de l’astrologie, du symbolisme et des religions solaires, ce sont des naissances d’enfants providentiels. Déjà l’inspiration juive hellénistique voyait dans la naissance d’Isaac la main de Dieu (comment un couple si âgé pourrait-il avoir un enfant naturellement ?), et la Genèse 6.4 parlait des Fils de Dieu qui viennent prendre des jeunes filles humaines. Matthieu fera référence à Esaïe 7.14 « Aussi bien le Seigneur vous donnera-t-il lui-même un signe : Voici que la jeune femme est enceinte et enfante un fils et elle lui donnera le nom d'Emmanuel. » Pour mémoire, le dieu Egyptien Amon-Râ faisait des enfants humains appelés pharaons. Antiochus IV avait instauré un culte du soleil avec une fête au solstice d’´hiver pour remercier le rallongement des journées.
Il faut bien considérer tout cet environnement culturel et religieux pour comprendre qu’il était important pour Luc, qui voulait bien entendu proclamer la naissance d’un Fils de Dieu, de créer les conditions favorables à cette naissance : un fils de Dieu ne peut pas naître comme un simple fils de charpentier, il en faut un peu plus quand même. Le style littéraire choisi est du pur style biblique, Dieu veut envoyer un message à un homme en particulier (les exemples sont nombreux dans l’Ecriture Sainte) : le messager arrive et se fait connaître, ce qui engendre un certain trouble chez la personne concernée, le messager délivre son message, l’intéressé réagit et le messager confirme le message avec un signe : nous avons bien tout cela dans cette Annonciation.
L’histoire n’est pas complètement hors-sol, car Luc est un écrivain sérieux : une jeune fille dès l’âge de 12 ans peut-être promise à un homme, elle devient sa fiancée dès que celui-ci paie la dot, mais elle pourra rester chez son père le temps que les conditions matérielles de la vie conjugale se réalisent. Durant cette période, elle est sous l’autorité de son père tout en appartenant à un autre homme.
Luc crée cet amusant parallèle entre Jésus et Jean-Baptiste : Zacharie ne croit pas un mot de ce que dit l’ange (en punition il deviendra sourd) alors que Marie accepte sans broncher. Le clin d’œil aux cultes solaires est évident : le Baptiste au solstice d’été et Jésus au solstice d’hiver : « il faudra que je diminue pour que celui-ci puisse grandir »
La force de Luc est de réunir dans ce court passage à la fois l’engendrement par Dieu, la filiation divine, la naissance virginale et la promesse d’un futur brillant. La puissance de l’Esprit a supplanté la virilité de l’homme.
Quant à Marie qui utilise le temps présent pour dire « je n’ai pas de relations conjugales », il n’en fallait pas plus pour développer l’idée qu’elle aurait fait vœu de rester toujours vierge…
Cette virginité supposée de Marie a fait couler beaucoup d’encre…sans que cela change vraiment la suite de l’histoire. Mais Luc a bien fait les choses en donnant à cet enfant une naissance à la hauteur de ce que ses lecteurs attendaient.
Le sixième mois, l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée du nom de Nazareth, à une jeune fille accordée en mariage à un homme nommé Joseph, de la famille de David ; cette jeune fille s’appelait Marie.
L’ange entra auprès d’elle et lui dit : « Sois joyeuse, toi qui as la faveur de Dieu, le Seigneur est avec toi. »
A ces mots, elle fut très troublée, et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation.
L’ange lui dit : « Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Voici que tu vas être enceinte, tu enfanteras un fils et tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; il régnera pour toujours sur la famille de Jacob, et son règne n’aura pas de fin. »
Marie dit à l’ange : « Comment cela se fera-t-il puisque je n’ai pas de relations conjugales ? »
L’ange lui répondit : « L’Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre ; c’est pourquoi celui qui va naître sera saint et sera appelé Fils de Dieu. Et voici que Elisabeth, ta parente, est elle aussi enceinte d’un fils dans sa vieillesse et elle en est à son sixième mois, elle qu’on appelait la stérile, car rien n’est impossible à Dieu. »
Marie dit alors : « Je suis la servante du Seigneur. Que tout se passe pour moi comme tu me l’as dit ! » Et l’ange la quitta.
Commentaire
Comme le 8 décembre était un dimanche, on passe à fêter L’immaculée Conception de la Bienheureuse Vierge Marie le lundi, en lisant le texte de l’Annonciation, normalement fêtée le 25 mars, 9 mois avant Noël, ce qui n’est pas sans logique.
Pour mémoire il y a 4 dogmes concernant Marie : l’immaculée conception (Marie serait née sans péché originelle afin que le fils de Dieu ne soit pas contaminé in vivo pendant sa grossesse, dogme émis en 1854), la maternité divine de Marie (Marie mère de Dieu en 431), la virginité perpétuelle de Marie (elle serait restée vierge toute sa vie, en 649) et finalement l’Assomption de Marie (en 1950).
L’annonciation de l’ange Gabriel à Marie est une création littéraire de Luc, qui ne sera pas reprise par Matthieu chez qui l’ange s’est adressé à Joseph en songe, ce qui correspond plus à une vue traditionnelle juive dans laquelle les choses sérieuses sont discutées entre les hommes. J’insiste encore une fois sur le fait que les évangiles de l’enfance de Jésus développés par Luc et par Matthieu sont des romans basés sur des traditions populaires en cours au moment où ils écrivent.
La christologie des toutes premières communautés chrétiennes est que la nature divine du Christ est apparue au grand jour avec la résurrection ; c’est au cours du temps que les chrétiens ont commencé à envisager une nature divine de Jésus plus tôt, certains voyant ce passage de l’humain vers le divin au moment de la Passion, d’autres au moment de la Transfiguration, d’autres encore au moment du baptême de Jésus, et ce n’est qu’assez tardivement (dans les années de Marc et de Matthieu) qu’ils vont envisager une nature divine dès l’enfantement de Marie. Luc va écrire dans un milieu juif d’influence grecque, dans une culture très riche au niveau religion et légendes : c’est la légende d’Isis et d’Hélios, c’est la naissance d’Alexandre le Grand racontée par Plutarque, c’est l’importance de l’astrologie, du symbolisme et des religions solaires, ce sont des naissances d’enfants providentiels. Déjà l’inspiration juive hellénistique voyait dans la naissance d’Isaac la main de Dieu (comment un couple si âgé pourrait-il avoir un enfant naturellement ?), et la Genèse 6.4 parlait des Fils de Dieu qui viennent prendre des jeunes filles humaines. Matthieu fera référence à Esaïe 7.14 « Aussi bien le Seigneur vous donnera-t-il lui-même un signe : Voici que la jeune femme est enceinte et enfante un fils et elle lui donnera le nom d'Emmanuel. » Pour mémoire, le dieu Egyptien Amon-Râ faisait des enfants humains appelés pharaons. Antiochus IV avait instauré un culte du soleil avec une fête au solstice d’´hiver pour remercier le rallongement des journées.
Il faut bien considérer tout cet environnement culturel et religieux pour comprendre qu’il était important pour Luc, qui voulait bien entendu proclamer la naissance d’un Fils de Dieu, de créer les conditions favorables à cette naissance : un fils de Dieu ne peut pas naître comme un simple fils de charpentier, il en faut un peu plus quand même. Le style littéraire choisi est du pur style biblique, Dieu veut envoyer un message à un homme en particulier (les exemples sont nombreux dans l’Ecriture Sainte) : le messager arrive et se fait connaître, ce qui engendre un certain trouble chez la personne concernée, le messager délivre son message, l’intéressé réagit et le messager confirme le message avec un signe : nous avons bien tout cela dans cette Annonciation.
L’histoire n’est pas complètement hors-sol, car Luc est un écrivain sérieux : une jeune fille dès l’âge de 12 ans peut-être promise à un homme, elle devient sa fiancée dès que celui-ci paie la dot, mais elle pourra rester chez son père le temps que les conditions matérielles de la vie conjugale se réalisent. Durant cette période, elle est sous l’autorité de son père tout en appartenant à un autre homme.
Luc crée cet amusant parallèle entre Jésus et Jean-Baptiste : Zacharie ne croit pas un mot de ce que dit l’ange (en punition il deviendra sourd) alors que Marie accepte sans broncher. Le clin d’œil aux cultes solaires est évident : le Baptiste au solstice d’été et Jésus au solstice d’hiver : « il faudra que je diminue pour que celui-ci puisse grandir »
La force de Luc est de réunir dans ce court passage à la fois l’engendrement par Dieu, la filiation divine, la naissance virginale et la promesse d’un futur brillant. La puissance de l’Esprit a supplanté la virilité de l’homme.
Quant à Marie qui utilise le temps présent pour dire « je n’ai pas de relations conjugales », il n’en fallait pas plus pour développer l’idée qu’elle aurait fait vœu de rester toujours vierge…
Cette virginité supposée de Marie a fait couler beaucoup d’encre…sans que cela change vraiment la suite de l’histoire. Mais Luc a bien fait les choses en donnant à cet enfant une naissance à la hauteur de ce que ses lecteurs attendaient.
Calendrier
Évangiles
Catégories
Intro
Avant-Propos
La foi c'est quoi?