Un peu de philosophie aujourd’hui, puisque Luc choisit de nous parler de prudence, l’une des 4 vertus cardinales de la philosophie grecque (avec la tempérance, la force d’âme et la justice) que d’abord les juifs hellénistes, puis les chrétiens garderont, en leur ajoutant les 3 vertus théologales que sont la foi, l’espérance et la charité. Pour mémoire, les maçons retiendront la tolérance, la bienfaisance et la solidarité. Ces vertus définissent l’excellence morale.
Sur la route de Jérusalem, alors que de nombreuses personnes suivent Jésus et sa troupe, il est temps de faire un peu le tri entre ceux qui suivent pour voir ce qui va se passer et ceux qui sont vraiment intéressés par la bonne nouvelle. Comment faire une sélection dans cet ensemble de disciples en puissance ? Probablement en leur rappelant ce que disciple veut dire, de rapprocher à ce mot celui de discipline qui suggère à la fois de l’obéissance, du mouvement, du déplacement. Que faut-il faire pour suivre Jésus ? Car à la fin, pour vivre avec la maître, il faut bien concéder quelques sacrifices.
Pour ceux qui entrent dans les ordres monastiques, il faut accepter 3 renoncements : renoncer aux biens matériels, renoncer à son ancienne manière de vivre, renoncer aux réalités présentes. On se souvient de Dieu qui parle à Abraham en Genèse 12,1 « quitte ton pays, ta famille et la maison de ton père ».
Et c’est exactement ce que l’on trouve ici. La traduction pour quitter la famille est difficile car Luc parle même d’en arriver à haïr ses proches ! Quand à l’image de la croix, il faut bien comprendre qu’elle est habituelle dans les années 80 : les Romains matent les rebelles par le supplice de la croix, et ils laissent les axes verticaux de celles-ci le long des chemins, avec les dépouilles associées car seuls les juifs veulent récupérer les corps. Il faut noter d’ailleurs que contrairement à ce que les peintres ont bien voulu nous montrer, les condamnés portaient seulement l’axe horizontal de la croix, celui-ci étant ensuite hissé au moyen de cordes à la hauteur souhaitée pour que tout le monde puisse bien s’en imprégner l’esprit. Devenir disciple de Jésus signifie se rendre libre de toute attache pour pouvoir le suivre dans tous ses mouvements, et être prêt à mourir en martyr.
Pour expliquer les 2 paragraphes suivants, il faut revenir au Proverbe 24,3-6 : « avec la sagesse on peut bâtir une maison…aussi tu mèneras la guerre en calculant bien ».
La prudence est la vertu qui dirige le comportement adéquat. Luc nous explique qu’il faut savoir se donner les moyens de ses ambitions. Pour Luc, cela signifie abandonner tous ses biens (on se souvient de la parabole du jeune homme riche devenu si triste à la demande de Jésus de vendre tous ses biens).
Pour nous, sans être aussi radical, on peut quand même imaginer qu’une certaine implication dans une vie chrétienne puisse signifier abdiquer de (quelques) biens matériels, mais aussi de son temps, de son talent à faire de l’argent, de ses ambitions égoïstes, de ses propres pulsions.
Bref, pas cool aujourd’hui.