Dans le livre des signes de Jean, cad les 12 premiers chapitres, nous allons essayer de comprendre l’activité de Jésus avant sa passion. Il faut insister : essayer de comprendre, car Jean est plus intéressé par l’impact des signes sur les hommes que par les signes en eux-mêmes. Jésus va faire plusieurs rencontres importantes avec des gens d’origines diverses (Nicodème est juif orthodoxe, la Samaritaine est juive hétérodoxe, l’officier royal sera plutôt païen), et Jean va observer l’impact de la rencontre de Jésus avec ces personnes, comment vont-ils croire.
Le pauvre Nicodème est un juif pieu, un notable membre du Sanhédrin, on peut dire qu’il représente le monde juif dans toute sa rigueur. Contrairement à d’autres collègues, il veut comprendre le phénomène Jésus car il a un doute, il ne voudrait pas passer à côté du messie que tout le peuple juif attend. Or nous savons déjà que les juifs pensent que le messie peut éventuellement se trouver incognito au milieu d’eux, et qu’il va se dévoiler tranquillement en faisant des choses extraordinaires et en se montrant capable de refaire certains miracles de l’Ecriture, en particulier ceux de l’Exode. Nicodème vient de nuit par peur d’être reconnu par des juifs dans la rue (ça ferait mauvais effet qu’un notable juif aille visiter un faux-prophète) pour poser quelques questions à Jésus ; il cherche honnêtement à se renseigner, en toute bonne-foi si j’ose dire. Nicodème croit à sa manière, il croit un peu, il croit que « Dieu est avec Jésus » (envoyé par Dieu), qu’il est l’envoyé de Dieu et il est arrivé à cette conclusion sur la base de l’énormité des signes que Jésus accomplit. On se souvient que pour les juifs, seul Dieu peut guérir certaines maladies comme la lèpre at autres handicaps de naissance.
Et c’est là que je dis : pauvre Nicodème ! Qui se retrouve embraqué dans un discours sur la chair et l’esprit, et sur le besoin de renaître pour entrer dans le Royaume. Jean va bien-entendu utiliser sa technique habituelle de rédaction pour créer un malentendu sur la naissance d’en-haut (faut-il retourner dans le ventre de sa mère ?).
Il faut probablement rapprocher ce texte des passages sur les enfants que l’on trouve dans les synoptiques. Chez Marc 10,15 « Laissez venir à moi les petits enfants…qui n’accueille pas le Royaume comme un enfant n’y entrera pas » (une phrase reprise par Luc 18.17). Matthieu reformulera cette expression pour en gommer un possible contresens (on accueille le Royaume ou l’enfant ?) en Mt 18.3 « Si vous ne changez pas et ne devenez comme des enfants, non, vous n’entrerez pas ». Il semble que Jean aille plus loin encore que les autres évangélistes sur la nécessité d’un nouveau départ dans la vie, du besoin d’abdiquer totalement de sa vie actuelle pour épouser une vie nouvelle.
L’expression « d’eau et d’esprit » appartient au vocabulaire des premiers chrétiens pour décrire le baptême chrétien en opposition au baptême du Baptiste qui ne baptisait que dans l’eau : dans le baptême chrétien, on a ajouté une effusion de l’esprit. Certains pensent que Jean assure qu’on ne peut être sauvé sans le baptême chrétien, c’est possible mais ce n’est pas certain et c’est totalement hors-sujet. Jean reprend le concept grec de la dualité des mondes avec un monde corporel et un monde transcendant, celui de l’Esprit. Pour Jean, ce monde de l’Esprit appartient à Dieu (d’en-haut) et c’est donc Dieu et uniquement lui qui peut décider de ceux qui seront aptes à naître dans ce monde de l’esprit, ceux qui seront choisis.
Si ce monde de l’esprit appartient à Dieu, alors rien ne sert de chercher à comprendre comment cela fonctionne, car la logique divine est inatteignable et incompréhensible pour l’homme, à l’image du vent. Renaître est aussi accepter de se faire conduire au gré de la volonté de Dieu sans pouvoir interférer, telle une feuille poussée par le vent.
Or il y avait, parmi les Pharisiens, un homme du nom de Nicodème, un des notables juifs. Il vint, de nuit, trouver Jésus et lui dit :
« Rabbi, nous savons que tu es un maître qui vient de la part de Dieu, car personne ne peut opérer les signes que tu fais si Dieu n’est pas avec lui. »
Jésus lui répondit : « En vérité, en vérité, je te le dis : à moins de naître de nouveau, nul ne peut voir le Royaume de Dieu. »
Nicodème lui dit : « Comment un homme pourrait-il naître s’il est vieux ? Pourrait-il entrer une seconde fois dans le sein de sa mère et naître ? »
Jésus lui répondit : « En vérité, en vérité, je te le dis : nul, s’il ne naît d’eau et d’Esprit, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l’Esprit est esprit.
Ne t’étonne pas si je t’ai dit : “Il vous faut naître d’en haut”.
Le vent souffle où il veut, et tu entends sa voix, mais tu ne sais ni d’où il vient ni où il va. Ainsi en est-il de quiconque est né de l’Esprit. »
Commentaire
Dans le livre des signes de Jean, cad les 12 premiers chapitres, nous allons essayer de comprendre l’activité de Jésus avant sa passion. Il faut insister : essayer de comprendre, car Jean est plus intéressé par l’impact des signes sur les hommes que par les signes en eux-mêmes. Jésus va faire plusieurs rencontres importantes avec des gens d’origines diverses (Nicodème est juif orthodoxe, la Samaritaine est juive hétérodoxe, l’officier royal sera plutôt païen), et Jean va observer l’impact de la rencontre de Jésus avec ces personnes, comment vont-ils croire.
Le pauvre Nicodème est un juif pieu, un notable membre du Sanhédrin, on peut dire qu’il représente le monde juif dans toute sa rigueur. Contrairement à d’autres collègues, il veut comprendre le phénomène Jésus car il a un doute, il ne voudrait pas passer à côté du messie que tout le peuple juif attend. Or nous savons déjà que les juifs pensent que le messie peut éventuellement se trouver incognito au milieu d’eux, et qu’il va se dévoiler tranquillement en faisant des choses extraordinaires et en se montrant capable de refaire certains miracles de l’Ecriture, en particulier ceux de l’Exode. Nicodème vient de nuit par peur d’être reconnu par des juifs dans la rue (ça ferait mauvais effet qu’un notable juif aille visiter un faux-prophète) pour poser quelques questions à Jésus ; il cherche honnêtement à se renseigner, en toute bonne-foi si j’ose dire. Nicodème croit à sa manière, il croit un peu, il croit que « Dieu est avec Jésus » (envoyé par Dieu), qu’il est l’envoyé de Dieu et il est arrivé à cette conclusion sur la base de l’énormité des signes que Jésus accomplit. On se souvient que pour les juifs, seul Dieu peut guérir certaines maladies comme la lèpre at autres handicaps de naissance.
Et c’est là que je dis : pauvre Nicodème ! Qui se retrouve embraqué dans un discours sur la chair et l’esprit, et sur le besoin de renaître pour entrer dans le Royaume. Jean va bien-entendu utiliser sa technique habituelle de rédaction pour créer un malentendu sur la naissance d’en-haut (faut-il retourner dans le ventre de sa mère ?).
Il faut probablement rapprocher ce texte des passages sur les enfants que l’on trouve dans les synoptiques. Chez Marc 10,15 « Laissez venir à moi les petits enfants…qui n’accueille pas le Royaume comme un enfant n’y entrera pas » (une phrase reprise par Luc 18.17). Matthieu reformulera cette expression pour en gommer un possible contresens (on accueille le Royaume ou l’enfant ?) en Mt 18.3 « Si vous ne changez pas et ne devenez comme des enfants, non, vous n’entrerez pas ». Il semble que Jean aille plus loin encore que les autres évangélistes sur la nécessité d’un nouveau départ dans la vie, du besoin d’abdiquer totalement de sa vie actuelle pour épouser une vie nouvelle.
L’expression « d’eau et d’esprit » appartient au vocabulaire des premiers chrétiens pour décrire le baptême chrétien en opposition au baptême du Baptiste qui ne baptisait que dans l’eau : dans le baptême chrétien, on a ajouté une effusion de l’esprit. Certains pensent que Jean assure qu’on ne peut être sauvé sans le baptême chrétien, c’est possible mais ce n’est pas certain et c’est totalement hors-sujet. Jean reprend le concept grec de la dualité des mondes avec un monde corporel et un monde transcendant, celui de l’Esprit. Pour Jean, ce monde de l’Esprit appartient à Dieu (d’en-haut) et c’est donc Dieu et uniquement lui qui peut décider de ceux qui seront aptes à naître dans ce monde de l’esprit, ceux qui seront choisis.
Si ce monde de l’esprit appartient à Dieu, alors rien ne sert de chercher à comprendre comment cela fonctionne, car la logique divine est inatteignable et incompréhensible pour l’homme, à l’image du vent. Renaître est aussi accepter de se faire conduire au gré de la volonté de Dieu sans pouvoir interférer, telle une feuille poussée par le vent.
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