On ne va pas se mentir : il s’agit-là d’un des passages le plus difficiles de l’évangile de Jean, probablement ajouté un peu plus tard pour bien mettre au clair l’histoire de l’eucharistie. Jean nous dit maintenant qu’en plus de croire, il faut participer à l’eucharistie (on appelle d’ailleurs ce passage la parenthèse eucharistique). Faut-il voir là une volonté d’intégrer le dogme de la grande église de Pierre ? Ou est-ce une manière de s’inscrire contre une dérive gnostique qui voudrait faire de Jésus un faux corps ?
Jean n’a pas mis l’institution de l’eucharistie dans le dernier repas du Christ, mais il fait un développement sur le sens de l’eucharistie en conclusion du chapitre sur le pain de vie. Jésus se présente comme le pain qui ne pourrit pas et qui donne la vie éternelle.
En l’an 100, l’eucharistie est le centre du rassemblement des chrétiens au moment de leur culte : ils écoutent la lecture et ils participent à l’eucharistie. Rendre l’eucharistie obligatoire signifie donc le culte obligatoire : il faut bien écouter la parole et prier si on veut suivre Dieu.
La manière dont est présentée l’eucharistie, sous une forme de cannibalisme en fait, doit être absolument scandaleuse pour les juifs ; pour eux en effet, le corps représente la matière de la création et le sang le souffle de la vie, ce qui explique le protocole Casher d’égorger les bêtes pour en laisser sortir le sang.
Devant le mystère de l’eucharistie, il y a deux options possibles.
Soit on prend le texte au pied de la lettre et on tombe sur la pensée catholique de la transsubstantiation, l’hostie devient vraiment le corps du Christ et le vin devient son sang ; quand on mange le pain de l’hostie, on mange effectivement le corps du Christ.
Moi je ne m’y résous pas. Je veux bien croire en Jésus et en Dieu, mais je n’arrive pas à croire à la matérialité de l’eucharistie.
L’autre option, plutôt développée par les protestants, Luther et Calvin, est de voir dans l’eucharistie le symbole du corps et de la vie offerts par le Christ dans sa passion. L’incarnation se trouve symbolisée par le corps dans le pain, et le souffle divin, celui du cœur, est symbolisé dans le vin. A ce moment on peut réellement se nourrir de Jésus, de sa vie sur terre, de son enseignement, et on peut se laisser inspirer par son esprit.
Pour moi, j’en resterais à cette interprétation spirituelle. Je vous laisse libre, bien sûr…