Nous sommes le mercredi des cendres, le premier jour du carême, et l’Eglise nous propose en cette occasion de lire ce passage de Matthieu sur l’aumône, la prière et le jeûne, les trois actions requises pour faire pénitence et prendre l’habit de deuil. Le fait que seul Matthieu rapporte ces paroles de Jésus laisse entendre qu’il les place dans le cadre d’une mise en cause de la religion juive probablement plus justifiée au temps de Matthieu qu’au temps de Jésus.
Jésus en effet ne met aucunement en cause ces trois pratiques, ce qu’il essaie de faire est plutôt de dénoncer l’hypocrisie qui l’accompagne ; il laisse entendre que les juifs pratiquent pour être vus des autres, alors qu’il conviendrait plutôt d’être discret, puisque Dieu, lui, voit ce genre de choses sans qu’il n’y ait besoin de faire du bruit autour.
Il n’y a aucun doute que ces trois actions sont obligées pour le fidèle juif : elles sont clairement énoncées dans les livres de l’Ancien Testament : l’aumône est au Deutéronome 15.11 « Et puisqu'il ne cessera pas d'y avoir des pauvres au milieu du pays, je te donne ce commandement : tu ouvriras ta main toute grande à ton frère, au malheureux et au pauvre que tu as dans ton pays », la prière et le jeûne sont largement détaillés dans le Lévitique. L’objectif de ces 3 pratiques est commun : se purifier pour pouvoir s’approcher de Dieu.
Les rabbins se sont bien entendu emparés du sujet pour définir le temps des prières (collectives au Temple et dans les Synagogues, individuelles à la maison ou dans la rue, debout, prosterné, à genoux, avec ou sans mouvement de balance…). Même chose pour le jeûne, avec des jeunes obligatoires et des jeûnes volontaires. Pour ce qui est de l’aumône, il n’y avait pas moins de 6 troncs pour les pauvres sur l’esplanade du temple et on sonnait de la trompette aux heures où il fallait donner.
Il semble que ces trois pratiques aient depuis toujours été la source de comportements déviants ; par exemple, Esaïe 58.5 « Doit-il être comme cela, le jeûne que je préfère, le jour où l'homme s'humilie ? S'agit-il de courber la tête comme un jonc, d'étaler en litière sac et cendre ? Est-ce pour cela que tu proclames un jeûne, un jour en faveur auprès du SEIGNEUR ? Le jeûne que je préfère, n'est-ce pas ceci : dénouer les liens provenant de la méchanceté, détacher les courroies du joug, renvoyer libres ceux qui ployaient, bref que vous mettiez en pièces tous les jougs ! »
Il me semble que le message de Jésus est assez clair et assez cohérent avec celui d’Esaïe : arrêtons de faire la course à des démonstrations de pureté et de piété, car celles-ci ne concernent que Dieu. La vanité religieuse est vaine et déplacée.
Quel rapport me direz-vous avec les cendres ? Le jeûne certes, on comprend qu’il ait été institué dès 325 au concile de Nicée, le fameux carême, mais pourquoi marquer le front des fidèles avec une croix de cendre ?
La prière dans l’Ancien Testament était synonyme de pénitence et de deuil, il fallait faire montre d’humilité et de crainte pour amadouer le Seigneur. Cette attitude de pénitence devait être ostentatoire : il fallait déchirer ses vêtements pour revêtir un sac de toile de jute (râpeux et de couleur sombre), et il convenait aussi de s’asperger de cendre ou de terre (pour bien montrer qu’on n’avait pas oublié la provenance de l’homme Genèse 3.19 « A la sueur de ton visage tu mangeras du pain jusqu'à ce que tu retournes au sol car c'est de lui que tu as été pris. Oui, tu es poussière et à la poussière tu retourneras. ». On trouve cela dans de très nombreux textes en particulier dans les livres d’Esther, de Daniel, de Joël mais aussi de Jonas qui incitait les habitants de Ninive à la conversion et à la pénitence : Jon 3.6 « La nouvelle parvint au roi de Ninive. Il se leva de son trône, fit glisser sa robe royale, se couvrit d'un sac, s'assit sur de la cendre ».
C’est ainsi que les traditions se suivent et se ressemblent parfois. Concernant la période Pascale, l’Eglise a longtemps insisté sur le deuil de la Passion bien plus que sur la joie de la Résurrection. Mais qui va encore à la messe du mercredi des cendres ?
Gardez-vous de pratiquer votre religion devant les hommes pour attirer leurs regards ; sinon, pas de récompense pour vous auprès de votre Père qui est aux cieux.
Quand donc tu fais l’aumône, ne le fais pas claironner devant toi, comme font les hypocrites dans les synagogues et dans les rues, en vue de la gloire qui vient des hommes. En vérité, je vous le déclare : ils ont reçu leur récompense.
Pour toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite, afin que ton aumône reste dans le secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra.
Et quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites qui aiment faire leurs prières debout dans les synagogues et les carrefours, afin d’être vus des hommes. En vérité, je vous le déclare : ils ont reçu leur récompense.
Pour toi, quand tu veux prier, entre dans ta chambre la plus retirée, verrouille ta porte et adresse ta prière à ton Père qui est là dans le secret. Et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra.
Quand vous jeûnez, ne prenez pas un air sombre, comme font les hypocrites: ils prennent une mine défaite pour bien montrer aux hommes qu’ils jeûnent. En vérité, je vous le déclare : ils ont reçu leur récompense.
Pour toi, quand tu jeûnes, parfume-toi la tête et lave-toi le visage, pour ne pas montrer aux hommes que tu jeûnes, mais seulement à ton Père qui est là dans le secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra.
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Nous sommes le mercredi des cendres, le premier jour du carême, et l’Eglise nous propose en cette occasion de lire ce passage de Matthieu sur l’aumône, la prière et le jeûne, les trois actions requises pour faire pénitence et prendre l’habit de deuil. Le fait que seul Matthieu rapporte ces paroles de Jésus laisse entendre qu’il les place dans le cadre d’une mise en cause de la religion juive probablement plus justifiée au temps de Matthieu qu’au temps de Jésus.
Jésus en effet ne met aucunement en cause ces trois pratiques, ce qu’il essaie de faire est plutôt de dénoncer l’hypocrisie qui l’accompagne ; il laisse entendre que les juifs pratiquent pour être vus des autres, alors qu’il conviendrait plutôt d’être discret, puisque Dieu, lui, voit ce genre de choses sans qu’il n’y ait besoin de faire du bruit autour.
Il n’y a aucun doute que ces trois actions sont obligées pour le fidèle juif : elles sont clairement énoncées dans les livres de l’Ancien Testament : l’aumône est au Deutéronome 15.11 « Et puisqu'il ne cessera pas d'y avoir des pauvres au milieu du pays, je te donne ce commandement : tu ouvriras ta main toute grande à ton frère, au malheureux et au pauvre que tu as dans ton pays », la prière et le jeûne sont largement détaillés dans le Lévitique. L’objectif de ces 3 pratiques est commun : se purifier pour pouvoir s’approcher de Dieu.
Les rabbins se sont bien entendu emparés du sujet pour définir le temps des prières (collectives au Temple et dans les Synagogues, individuelles à la maison ou dans la rue, debout, prosterné, à genoux, avec ou sans mouvement de balance…). Même chose pour le jeûne, avec des jeunes obligatoires et des jeûnes volontaires. Pour ce qui est de l’aumône, il n’y avait pas moins de 6 troncs pour les pauvres sur l’esplanade du temple et on sonnait de la trompette aux heures où il fallait donner.
Il semble que ces trois pratiques aient depuis toujours été la source de comportements déviants ; par exemple, Esaïe 58.5 « Doit-il être comme cela, le jeûne que je préfère, le jour où l'homme s'humilie ? S'agit-il de courber la tête comme un jonc, d'étaler en litière sac et cendre ? Est-ce pour cela que tu proclames un jeûne, un jour en faveur auprès du SEIGNEUR ? Le jeûne que je préfère, n'est-ce pas ceci : dénouer les liens provenant de la méchanceté, détacher les courroies du joug, renvoyer libres ceux qui ployaient, bref que vous mettiez en pièces tous les jougs ! »
Il me semble que le message de Jésus est assez clair et assez cohérent avec celui d’Esaïe : arrêtons de faire la course à des démonstrations de pureté et de piété, car celles-ci ne concernent que Dieu. La vanité religieuse est vaine et déplacée.
Quel rapport me direz-vous avec les cendres ? Le jeûne certes, on comprend qu’il ait été institué dès 325 au concile de Nicée, le fameux carême, mais pourquoi marquer le front des fidèles avec une croix de cendre ?
La prière dans l’Ancien Testament était synonyme de pénitence et de deuil, il fallait faire montre d’humilité et de crainte pour amadouer le Seigneur. Cette attitude de pénitence devait être ostentatoire : il fallait déchirer ses vêtements pour revêtir un sac de toile de jute (râpeux et de couleur sombre), et il convenait aussi de s’asperger de cendre ou de terre (pour bien montrer qu’on n’avait pas oublié la provenance de l’homme Genèse 3.19 « A la sueur de ton visage tu mangeras du pain jusqu'à ce que tu retournes au sol car c'est de lui que tu as été pris. Oui, tu es poussière et à la poussière tu retourneras. ». On trouve cela dans de très nombreux textes en particulier dans les livres d’Esther, de Daniel, de Joël mais aussi de Jonas qui incitait les habitants de Ninive à la conversion et à la pénitence : Jon 3.6 « La nouvelle parvint au roi de Ninive. Il se leva de son trône, fit glisser sa robe royale, se couvrit d'un sac, s'assit sur de la cendre ».
C’est ainsi que les traditions se suivent et se ressemblent parfois. Concernant la période Pascale, l’Eglise a longtemps insisté sur le deuil de la Passion bien plus que sur la joie de la Résurrection. Mais qui va encore à la messe du mercredi des cendres ?
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