Les mains sales

On ne trouvera pas dans la Torah ces prescriptions rituelles ; certaines étaient définies pour le service des prêtres (Lévitique 7), mais rien de plus. Ce sont les pharisiens qui vont chercher à appliquer ces mêmes obligations rituelles à tous les fidèles, ce sera donc un travail de prescriptions rabbiniques que l’on essaiera de passer comme la « tradition des pères ». On en connaît trois : se laver les mains avant de manger (il s’agit plutôt de les purifier par une petite quantité d’eau au creux de la main), asperger les aliments au retour du marché et laver la vaisselle et les instruments de cuisine par immersion. De la même façon qu’on ne sait pas quels sont ceux des disciples qui ne suivent pas ces rituels, on ne sait pas non plus si tous les pharisiens s’y soumettaient.

Jésus répond en citant un verset d’Isaïe 29.13 « Ce peuple ne s'approche de moi qu'en paroles, ses lèvres seules me rendent gloire, mais son cœur est loin de moi. La crainte qu'il me témoigne n'est que précepte humain, leçon apprise. » Le sujet qui est développé dans ce passage du 1^er Isaïe est l’opposition entre la religion des lèvres et celle du cœur ; pour Isaïe, il s’agissait des lèvres qui parlent, pour Marc ce sont les lèvres qui mangent.

Jésus va d’ailleurs citer l’exemple de la règle du Korban (le passage a été omis dans la sélection du jour) pour mettre en valeur que loi et tradition s’opposent parfois.

Pour Marc, c’est dans le cœur, siège de la volonté et de la personnalité, que se décide le pur et l’impur. Les pharisiens sont préoccupés par l’impureté qui entre, Marc par celle qui sort. Marc effectue donc une translation entre le respect du rite et la morale.

On le voit très bien dans les derniers versets qui nous livrent une liste de 12 pensées mauvaises : les 6 premières, exprimées au pluriel, correspondent à la faute relativement au décalogue, alors que les 6 dernières, exprimées au singulier, énoncent des mauvaises attitudes, cad un comportement immoral de l’homme.

Il va de soi que ce texte pose la question de la morale chrétienne. Mais il faut bien avouer que ces 6 dernières attitudes se trouvent aussi dans le livre de la Sagesse, dans la morale d’Aristote et dans d’autres religions comme le bouddhisme.

Peut-être pourrait-on conclure en citant le 1^er livre de Samuel16.7 « Ne considère pas son apparence ni sa haute taille. Je le rejette. Il ne s'agit pas ici de ce que voient les hommes : les hommes voient ce qui leur saute aux yeux, mais le SEIGNEUR voit le cœur. »

C’est donc bien là-dedans que cela se passe.