Cette guérison du paralytique est commune aux 3 synoptiques (Mc 2, 1-12 et Lc 5,17-26). Pourquoi est-elle intéressante ?
Le texte de Matthieu est beaucoup plus sommaire que celui de Luc, personne ne descend le paralysée par le toit. Matthieu fait bien attention de ne pas placer le nom de Dieu dans les paroles de Jésus, il n’y a donc pas de blasphème à proprement parler. Pour Matthieu, le monde est en attente d’un secours global de la part de Dieu. Si le pardon n’est pas vérifiable, le miracle l’est lui, il est annoncé et immédiatement réalisé de manière à bien marquer les consciences.
Ce passage met en valeur plusieurs choses :
- La foi dont parle Matthieu est la foi dans le guérisseur, il n’est absolument pas fait référence à une quelconque foi en Dieu. Et pourtant la 1ère intervention de Jésus se place bien sur sa liaison avec Dieu, car c’est Dieu qui peut remettre les péchés.
- La guérison est bien un miracle, et non un signe. On se souvient que l’on parle de signes chez Jean : ce sont des choses qui se passent et le public peut voir dans ces choses l’expression que Jésus est le fils, ou pas. Ici, alors qu’on sait bien que Jésus se méfie des miracles car il les considère un peu comme des attrape-nigauds, Jésus va jouer du miracle pour forcer non pas l’admiration, mais l’identification.
On a toujours un peu de mal avec ces miracles, car on peine à les imaginer comme ayant réellement eu lieu. Or typiquement, il est assez probable que celui-ci ait eu lieu, car il est attesté de nombreuses fois et personne ne met plus en cause le fait que l’homme nommé Jésus ait été un guérisseur exceptionnel. Ce qui nous perturbe est que l’évangéliste vient coller ce récit de miracle à une discussion nettement plus théologique qui est le pardon des péchés. Car le fond du sujet est la discussion avec les scribes pour qui le pardon ne peut être que de Dieu (Yom Kippour), que les péchés sont des agissements contre Dieu et qu’on ne peut pas vraiment savoir s’il les a pardonnés avant le jugement dernier. Or la position des chrétiens est de soutenir que le pardon est comme le péché, permanent, et que Jésus a été mandaté par son père pour pardonner chacun des hommes (c’est aussi le sens du baptême). Pour les chrétiens, toute offense envers son frère devient une atteinte à la création de Dieu et aux commandements d’amour, donc péché. C’est assez différent de l’interprétation juive.
C’est pour cela que l’exégète Pierre Bonnard nous suggère de ne considérer les récits de miracle que comme des illustrations de l’autorité de Jésus. Ce texte est sur le pardon, il ne faut pas laisser le miracle prendre toute la place.
Même si la formule « lève-toi et marche » est restée dans les annales