Je vous accorde que le texte est un peu difficile, mais il y a une raison à cela. Il est probable que les v.51 à 58 aient été ajoutés postérieurement. En effet, on est passé en un instant du pain de vie à la chair et au sang de l’eucharistie, c’est quand même un peu rapide.
Le cannibalisme religieux est une horreur pour les juifs, écrire le texte de cette manière est une véritable provocation. Quant à la théorie de la transsubstantiation, la présence de Dieu dans l’hostie, elle a tout simplement déchainé l’ire des chrétiens protestants.
Alors pourquoi ce glissement vers l’eucharistie ?
Il faut bien reconnaître que la version originale de l’évangile de St. Jean ne développe pas vraiment la Cène, et qu’il n’y a donc aucune explication sur l’eucharistie. C’est au moment de la multiplication des pains que Jean voit l’institution de celle-ci, et il a donc fallu ajouter une explication après cette multiplication, en sortie du pain de vie, pourquoi pas ?
L’autre raison de voir débarquer la chair et le sang peut être aussi la contestation d’une dérive gnostique dans la communauté de Jean. On se souvient que celle-ci a disparu assez tôt à cause de la scission de ses membres entre ceux qui ont tenu des propos jugés hérétiques sur l’absence de nature humaine chez le Christ et ceux qui se sont maintenus dans le concept de l’incarnation, et qui ont rejoint ensuite la grande Église, celle de Pierre. Faire appel à ces images de chair et de sang est un moyen assez direct de rappeler l’humanité du Christ.
Alors, est-on sauvé par la foi ou par l’eucharistie ? La foi cela veut dire croire en la divinité de Jésus et aussi écouter ce qu’il dit ; s’il a institué l’eucharistie et la vie en communauté de frères, c’est pour qu’on le suive. Or l’eucharistie dans les années 100 représentait l’essentiel du culte chrétien. Il n’y a donc pas incompatibilité…