La suite du passage de dimanche dernier sur la justice chrétienne, celle du cœur et non de la Loi, chasser les mauvais sentiments de son cœur pour ne pas risquer de se mettre sous le coup de la Loi. Je vous invite à relire mon commentaire du 13 juin 2022 sur ce passage (www.jeusfacile.com) pour mieux comprendre le détail de chacun des exemples donnés par Jésus.
Ce que je vous propose aujourd’hui est de relire ce passage à la lumière d’une réflexion sur la vengeance au cours des siècles. Dans les temps très anciens, la vengeance était réservée aux dieux, á Dieu. C’était la colère d’un dieu qui veut se venger des blessures que lui infligent les hommes en ne le priant pas assez. La vengeance est le sentiment qui habite l’ensemble du livre de la Genèse : en Gn 4, Caïn a peur de la vengeance des hommes et le Seigneur prend sa défense en annonçant que celui qui voudra tuer Caïn sera vengé 7 fois. Dans le même chapitre, Lamek dit à ses femmes que dans son cas, il sera vengé 77 fois. Il y a dans la Genèse une propagation de la violence par un facteur de 7, Lamek s’approprie une vengeance autrefois réservée à Dieu. C’est cette violence inhérente à l’homme que Dieu n’avait pas prévue dans la création et qu’il va tenter de corriger ensuite par le déluge.
Avant cette loi du Talion (talio veut dire pareil en latin) que l’on décrit longuement en Exode 21.24, en Lv 24.20 et en Dt 19.21, la vengeance ou la punition était proportionnelle au statut social, et c’est pour cela que la bible insiste toujours sur le statut des personnes en cause, esclave ou maître. La loi du talion est clairement une amélioration de la justice dans le sens où elle met toutes les personnes sur un pied d’égalité et où elle freine la démultiplication de la vengeance.
Le message de Jésus est que Dieu considère que même cette loi du talion est insuffisante pour permettre à l’homme de vivre en paix. La loi a peut-être amélioré la situation, mais elle ne suffit pas, il convient de la dépasser. Toujours sur le même principe : « don’t even think »
Il faut bien entendu relire le couplet sur l’amour de l’ennemi à la lumière de la passion : la perfection de Dieu est de pardonner même à ceux qui ont assassiné son fils. Et donc bien entendu, c’est un message à ceux qui vont se faire torturer ou assassiner au nom de Jésus et de l’évangile. Jésus nous rappelle l’inutilité de la colère dans notre vie : elle ne changera rien au lever du soleil ni à la tombée de la pluie, et aimer ceux qui nous conviennent est à la portée de tous, bons et méchants.
Marquer la différence n’est pas toujours facile. Et c’est pourtant cela la proposition de Jésus.