Pour une fois, le passage est long et assez difficile. Depuis les dieux mésopotamiens en -4000, il est assimilé au sein de la population que certaines maladies psychiques ou psychosomatiques sont dues à une obsession ou à une possession démoniaque. C’est aussi le cas pour l’épilepsie. De manière surprenante, rien de semblable n’est relaté dans les textes de l’Ancien Testament ; on recommence à en parler dans le livre de Tobie, et puis dans le Nouveau Testament. Un renouveau lié au développement de l’art de la magie dans l’empire romain. L’exorcisme fait partie des techniques médicales courantes de l’époque, la particularité de Jésus étant de couvrir la totalité de ces techniques et de les lier à la proclamation de la parole, donc à Dieu.
Le verset important du passage est le Lc 11,20 « Mais si c'est par le doigt de Dieu que je chasse les démons, alors le Règne de Dieu vient de vous atteindre ». Il est l’une des phrases que la recherche historique pense pouvoir attribuer réellement à Jésus.
Il nous faut partir voir le livre de l’Exode, au chapitre 8 qui parle des 10 plaies d’Egypte. Moïse et Aaron cherchent à convaincre Pharaon de laisser partir les juifs, leurs enfants et leur bétail, vers la terre promise. Pour faire pression, Dieu aidera les deux frères en envoyant sur les Egyptiens un certain nombre de catastrophes : L’eau du Nil changée en sang, l’invasion de grenouilles, puis des moustiques, puis de la vermine, puis la peste du bétail, les furoncles, la grêle, les sauterelles, les ténèbres…mais chaque fois, Pharaon refuse de les laisser partir. Ce ne sera qu’avec la mort des premiers-nés que les juifs pourront effectivement s’enfuir.
Or il y a des magiciens au service du Pharaon et ceux-ci se montrent capables de réaliser aussi les premières plaies. Cependant avec les moustiques, les magiciens n’y arrivent pas et ce sont eux qui vont alerter Pharaon en lui disant : attention, cette fois ce n’est pas nous, c’est vraiment le doigt de Dieu. C’est ce que reprend Jésus en disant aux juifs : si c’est bien le doigt de Dieu qui fait cela, alors c’est que Dieu est là.
Cette question de bien identifier qui est à la base de ces guérisons et autres actes d’exorcisme, que certains pourraient volontiers interpréter comme des actes de magie, est importante car Jésus s’en sert comme le lien entre ses pouvoirs de guérisseur et sa proclamation de l’évangile. Il tient à réaffirmer son opposition à Satan, qui je vous le rappelle, est une figure connue à l’époque. Si les dieux peuvent varier d’une religion à l’autre, le Mal est lui toujours le même.
Les deux derniers paragraphes sont intéressants eux-aussi, car ils dénoncent le risque de rechute. Un risque qui s’adapte aussi bien aux malades qu’aux juifs, qui pourraient se penser soignés en choisissant de se joindre aux chrétiens, mais qui pourraient aussi se trouver incités à revenir à la synagogue désertée. Attention aux conversions éphémères !
Luc continue dans la simplicité : qui n’est pas avec moi est contre moi…le gris n’existe pas chez Luc.