Encore un passage qu’’il convient de lire au temps de Matthieu plus qu’au temps de Jésus.
Le Sanhédrin était considéré comme l’assemblée décisionnaire et représentative chez les juifs. On trouve déjà dans l’Exode la mention de 70 sages accompagnant Moïse et ses fils sur le mont Sinaï. Il y avait aussi des petits Sanhédrins de 23 membres dans les grandes villes de province, avec un rôle judiciaire ; il y avait un grand Sanhédrin au temple de Jérusalem, composé de 71 membres, tous considérés comme sages et bons connaisseurs de la Loi. Ce même grand sanhédrin du temps d’Hérode avait une partie politique (sadducéens) et une partie religieuse (pharisiens).
Comme on l’a vu, Vespasien et Titus livrent la guerre contre les juifs, entre 63 et 70, avec la prise de Jérusalem et la destruction du temple. En 69, Vespasien aurait envoyé les juifs fidèles à Rome vers la ville de Lod et il aurait autorisé un certain Rabin Yohanan ben Zakkai à reconstruire une cellule de la foi juive à Yabneh (Jamnia, en Palestine). Lui et son successeur, Gamaliel de Yabneh vont faire renaitre un nouveau Grand Sanhédrin avec des pouvoirs limités certes, mais exclusivement pharisien. Et ce sera la seule autorité juive reconnue par Rome pendant de nombreuses années. C’est ce sanhédrin de Yabneh qui sera plus tard à la base de la rédaction de la Mishna en 219.
A partir de 85, Gamaliel crée une 12ème bénédiction, celle des hérétiques ; une bénédiction pour celui qui prononce cette malédiction, car il s’agit en fait de tout mettre en œuvre pour identifier et éloigner ceux des membres des synagogues qui pourraient être affiliés à une secte quelconque. Etaient considérées comme secte à cette époque, outre les chrétiens (notsrims), les sadducéens, les esséniens, les baptistes et autres mouvements divers. Pour être honnête, il s’agit plus d’une purge que d’une réelle persécution. En ce 1er siècle, il n’y aura qu’une seule persécution organisée à Rome par Néron, après l’incendie en 64.
On a bien compris que Matthieu a besoin de présenter cette lutte entre juifs et chrétiens (effectivement pour la plupart issus d’une même famille) d’une manière sombre, pour mobiliser ses troupes et redonner du courage.
En fait ces tribunaux de province pouvaient être assez violents en appliquant la torture à qui refusaient d’avouer…surtout pour le cas des femmes adultères.