Nous avons lu la version de Marc le 15 janvier dernier et celle de Luc le 5 mars : elles ne diffèrent pas beaucoup de celle de Matthieu. Dans le cas de Matthieu, le texte est amusant si on croit que le Lévi de Luc est le Matthieu apôtre, un Matthieu évangéliste qui parlerait du Matthieu apôtre qui serait le Matthieu pécheur…
Il y a là-dedans une citation du livre d’Osée que je dois vous lire ; Dieu fait des reproches à son peuple. « Car c’est l’amour qui me plaît, non le sacrifice. Et la connaissance de Dieu je la préfère aux holocaustes » Pour les juifs de l’an 75 qui sont en train de vivre l’absence du temple et sont en train de réfléchir à une réorganisation de leur communauté qui vient d’être annihilée par Titus, leur analyse de ce passage d’Osée est de dire « Dieu ne veut plus que l’on fasse des offrandes, il préfère nos œuvres de miséricorde (vêtir l’homme nu, nourrir l’affamé, visiter le malade et éventuellement afficher une certaine sollicitude envers le pécheur) ». Et alors qu’ils sont en pleine recomposition de leur groupe autour d’une vision rigoureuse de leur foi, ils demandent aux juifs devenus chrétiens : « mais pourquoi acceptez-vous des pécheurs dans vos rangs ? »
C’est bien cela le problème de ces Pharisiens, c’est qu’ils se veulent séparés. La sollicitude envers le pécheur doit être vue d’une manière intellectuelle, spirituelle, mais surtout pas physique, on connaît les règles de pureté. Et c’est cela que Jésus/Matthieu oppose aux pharisiens : en restant séparés, vous ne pouvez convertir. Plus moyen de dire « va tes péchés sont pardonnés », plus moyen d’aller chercher la brebis égarée car il faudra bien la prendre sur ses épaules. Et c’est bien cette différence d’approche qui fera que les chrétiens de Matthieu seront rejetés par les juifs en 80, car c’est une fois de plus un évangile qu’il convient de lire au temps de Matthieu plus qu’à celui de Jésus.
Un peu plus haut dans le texte, Osée fera dire à Dieu : « votre amour est comme la nuée du matin, comme la rosée matinale qui passe » En ces temps de grosse chaleur, gardons la tête froide.